Colonies de vacances pour enfants et adolescents
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Comme un vent de liberté

Faire émerger les envies des enfants et les accompagner dans leurs projets : plongée dans une colo où chacun décide de son programme.

Reportage dans une colo qui donne un véritable pouvoir de décision aux enfants et adolescents

Une colonie de vacances en Bretagne, à quelques pas de l’océan. Juchée sur un muret, Cindy nous accueille dans la cour du centre d’un vibrant : "Bonjour, t’es qui ?" Les présentations faites, la fillette de 8 ans nous entraîne d’un pas assuré, en traversant une course de trottinettes et une partie de foot disputée, jusqu’à Isabelle, la directrice du séjour. Cinquante enfants sont sous sa responsabilité et celle de neuf animateurs.

Il est bientôt 10h, les activités démarrent. "Certains enfants se sont réveillés au petit matin, d’autres viennent d’émerger il y a une heure", témoigne Isabelle. Ici, le lever est individualisé : les lève-tôt ont le droit de rejoindre la bibliothèque et la ludothèque du centre avant même le petit déjeuner. Quant aux gros dormeurs, rien ne les presse : les activités ne démarrent jamais trop tôt.

L’enfant est ici invité à s’exprimer, encouragé à agir, poussé à décider par lui-même.

L’organisation du lever, qui exige une grande coordination de l’équipe, est à l’image de l’ensemble du fonctionnement de la colonie de vacances. Le cadre de ce séjour a été pensé pour mettre les enfants en situation d’agir, sans être en permanence sous la coupe réglée des adultes. L’organisation de la colo vise à s’adapter aux enfants, et non l’inverse. Un renversement qui n’est possible que parce que l’enfant est ici invité à s’exprimer, encouragé à agir, poussé à décider par lui-même. "L’investissement des adultes dans ce type de fonctionnement est essentiel mais n’a rien d’évident. Car donner du pouvoir aux enfants, c’est accepter de céder un peu du sien", explique Isabelle, qui avoue avoir consacré beaucoup de temps en équipe à la préparation de ce séjour.


Faire aboutir les projets des enfants

Un peu plus loin, nous retrouvons Axel, accaparé par la construction de son catamaran en bois. Ce garçon de 12 ans et demi, l’un des plus âgés, a vite pris ses marques dans le séjour. "Au début, je savais pas trop quoi construire et maintenant, j’ai plein idées. Là, je réfléchis à la matière de la voile du bateau", dit-il, deux bouts de plastique dans une main et une paire de ciseaux dans l’autre. Eva, son animatrice, fait le tour des tables de l’atelier pour conseiller chaque enfant dans son projet. Elle n’est pas réellement moteur de l’activité - même si elle a contribué dans les premiers jours à la rendre intéressante aux yeux des enfants - mais se retrouve pleinement dans un rôle d’accompagnement pour faire aboutir les idées des enfants.

A l’intérieur d’une des salles, une carte IGN a été dépliée : un groupe de huit enfants et un animateur planifient leur nuit en bivouac. Un agriculteur installé à quelques kilomètres a mis son champ à disposition des enfants. Ils le rejoindront en vélo et décident dès maintenant de l’itinéraire le plus adapté. Juste après, ils enchaîneront avec le choix des menus, préparés au barbecue et au four artisanal construit pour l’occasion.

La colo idéale ? La directrice nous arrête sans détour : elle et son équipe ont aussi à gérer des disputes, des frustrations ou des coups de blues. "Parce qu’on donne un espace aux enfants pour s’exprimer, des plaintes remontent fréquemment jusqu’à nous". Au rayon des petits conflits, les frictions nées de la vie en collectivité sont les plus nombreuses. L’autre jour, deux enfants ont protesté pour le bruit provoqué par la chambre voisine au début de la nuit. Hier, c’était les "grands" mis sur le banc des accusés pour utiliser trop souvent les trottinettes. Isabelle encore : "Certains problèmes de fonctionnement sont discutés en groupe, d’autres sont réglés de façon plus discrète. Ils trouvent des solutions rapides, c’est ce qui évite d’envenimer les choses".


Activités en autonomie

On l’interroge ensuite sur ce groupe de quatre enfants, affairés à écrire le journal du centre sans animateur auprès d’eux. Ils mettent en page un article sur l’un des ordinateurs. "Ils savent faire. Et s’ils rencontrent un souci, l’animateur qui suit ce projet est juste à côté", avance Ia directrice. Qui reconnaît ensuite que ce fonctionnement a fait l’objet d’un débat lors de la préparation du séjour. A l’heure où l’on réclame une surveillance continue des enfants, la directrice assume ses choix et les argumente. "Avant le séjour, certains animateurs étaient d’accord avec ce fonctionnement mais craignaient de ne pas trouver leur place. Pourtant, si ces petites activités en autonomie sont possibles, c’est justement parce que le cadre a été beaucoup réfléchi en amont par ces mêmes animateurs".

Une des clés de voûte du séjour, c’est aussi le rythme de vie des enfants. Thomas, l’assistant sanitaire de la colo, garde un oeil sur ce paramètre en plus d’assurer la gestion des soins courants. "Les vacances ne sont pas synonymes de couchers tardifs ni d’activités intensives, au contraire." Des protestations des enfants sur les horaires du soir ? "Etrangement, non. Les couchers ne suivent jamais la fin de la veillée. Les enfants ont une vraie transition avant de se coucher, c’est sans doute ce qui aide." Quant aux différentes activités pratiquées, elles ne sont pas toutes basées sur une pratique physique. Mais Thomas reconnaît que les sollicitations des enfants sont nombreuses : leur investissement dans un projet le surprend parfois, surtout quand ils en oublient les horaires élémentaires du repas !

Retour dans la cour du centre. Les enfants achèvent leur activité avant d’aller manger, au moment où le ciel se couvre fortement. Premier accroc en vue. La pluie est attendue pour l’après-midi, l’annonce en est faite aux enfants. Malgré la déception légitime, certains ne se laissent pas abattre. Kathleen, 7 ans, a déjà trouvé deux copines intéressées pour partir chasser les escargots. D’autres se verraient bien rester au centre à préparer le goûter pour toute la colo. Les animateurs échangent des sourires entendus. Le programme de la journée est changé en un tour de main !